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16 décembre 2013 1 16 /12 /décembre /2013 21:56

Bonjour

Dernièrement un collègue me déclare: "j'ai de l'argent sur mon livret A et mon PEL, plus un peu de liquide sur mon compte courant, j'ai aussi de l'épargne sur un contrat d'assurance-vie. C'est mon argent, je le retire quand je veux."

Ce collègue pense sincèrement que son épargne est là, disponible, et n'attend qu'une instruction de sa part pour lui revenir. C'est complètement faux.

Prenons le cas de l'assurance-vie en Euros: ce collègue y a placé 50 000€ en 2004; l'assureur a regroupé les versements de ses adhérents et acheté des obligations du Trésor Public, l'Etat a dépensé l'argent de ses émissions obligataires et des recettes fiscales pour payer les fonctionnaires, combler le trou de la sécu, entretenir les infrastructures du pays, etc. Bref l'Etat a DEPENSE cette épargne aussitôt, la même année. Donc l'épargne du collègue n'existe plus ! Elle a été mangée depuis longtemps. Le collègue s'est il rendu compte qu'en fait il payait un impôt volontaire ? la différence avec un impôt classique étant qu'il peut revendre les obligations à autrui et récupérer du cash, à condition de trouver un acheteur...

Et l'année suivante, l'Etat a de nouveau eu un déficit budgétaire, c'est-à-dire qu'il a dû de nouveau émettre des obligations du Trésor Public pour compléter des recettes fiscales insuffisantes (nous n'avons pourtant pas l'impression de payer peu d'impôts). Et l'année suivante encore, comme chaque année depuis la présidence de Georges Pompidou.

Pourtant on peut faire un rachat sur un contrat d'assurance-vie, alors d'où vient l'argent ? En général l'assureur reçoit plus de versements qu'il n'a de rachats, les premiers servent donc à payer les seconds. Une année où les rachats excèderaient les versements, l'assureur vendrait des obligations sur le marché secondaire, c'est-à-dire à d'autres investisseurs institutionnels qui eux ont davantage de souscriptions. Dans le cas normal, l'épargnant peut retirer de l'argent parce que d'autres personnes versent davantage.

Mais si la plupart des institutionnels faisaient tous face à une demande générale de remboursement, alors une panique baissière s'emparerait des marchés obligataires: un krach obligataire, les obligations s'échangeraient à un prix de plus en plus bas sur le marché, puisque beaucoup de gros vendeurs seraient en compétition pour les vendre et récupérer du cash. Avec l'argent récupéré, l'assureur peut payer les rachats, mais avec une moins-value sur ses comptes puis qu'il a vendu les obligations moins chères qu'il ne les avait achetées au Trésor; en fait le portefeuille obligataire de l'assureur a maintenant une valeur de marché inférieure à l'épargne initialement recueillie: son taux de couverture est inférieur à 1; et donc si la vague de rachats continue, il arrive un moment où l'assureur a vendu toutes les obligations à prix cassé et n'a plus rien pour rembourser les derniers adhérents ! C'est la faillite de l'assureur et la perte totale pour l'épargnant.

En fait l'assureur voit la chose venir, toute la profession de l'assurance-vie est dans le même cas et appelle à l'aide l'AMF (Autorité des Marchés Financiers); pour stopper la spirale baissière, l'AMF décrète le gel des contrats d'assurance: rachats interdits, arbitrages en sortie interdits, avances interdites, tout est gelé jusqu'à ce que les autorités définissent un dénouement de la crise en bon ordre; cela n'étant jamais arrivé, on ne sait pas exactement quelles décisions seraient prises, mais on peut penser à une perte partielle en capital pour tous, un gel de l'épargne pour plusieurs années, voire la transformation du capital en rente à un taux fixé par le gouvernement.

Donc vous l'avez compris, il n'y a pas de stock d'épargne, aucun coffre où l'épargnant pourrait récupérer la sienne. Tout est affaire de flux financier: les versements doivent dépasser les retraits, et même largement puisqu'il faut alimenter l'Etat, toujours insatiable.

Malheureusement les années d'épargne des baby-boomers touchent à leur fin: la génération née entre 1945 et 1965 a beaucoup épargné, en fait elle a naïvement donné son épargne au Trésor Public qui l'a engloutie sans espoir de retour; cette génération arrive à la retraite, avec un revenu en baisse, des frais de santé et commence à vouloir retirer de l'épargne.

Mais alors qui va rendre son épargne à la génération du bayboom ? personne: L'Etat ne va pas lui rendre les 1900 Milliards d'Euros que celà représente, il les a dépensés depuis longtemps, il a besoin de rentrées supplémentaires, pas de sorties. La génération suivante est moins nombreuse, et va avoir du mal à payer la retraite des ainés, sa capacité d'épargne est moindre. Sur cette tendance longue s'ajoutent une crise immobilière en Amérique (les subprimes), des crises de l'Euro chez nous, et le système commence à se gripper. Pour palier au déficit des flux financiers, pour alimenter les Etats en liquidités qui se mettent à manquer, les banques centrales créent alors de la monnaie et complètent l'épargne des épargnants, ce sont les QE ou LTRO; les obligations gardent leur valeur, l'Etat continue à payer ses fonctionnaires, les épargnants croient toujours détenir leur épargne. On est sauvé.

Mais les banques centrales ne vont pas financer les états indéfiniment, une inflation excessive arriverait (vous avez vu les augmentations de l'essence, de votre assurance automobile, de vos impôts,etc, pensez vous que l'inflation est réellement autour de 1% ? ou bien plus...), les occidentaux déprécient leurs monnaies, au détriment des pays dits émergents, lesquels trouveront la parade (la Chine travaille à diffuser le Yuan pour les échanges commerciaux, à la place du dollar our de l'Euro).

A un moment donné, les inconvénients des émissions monétaires dépasseront les avantages, seront arrêtées et il faudra régler la note: défaut partiel des états c'est-à-dire perte d'une partie de leur épargne par les gens (de 10 à 50% selon les pays), et/ou transformation en rente à un taux administré et misérable.

Vous voyez donc que l'épargne des uns n'est assurée que tant que beaucoup d'autres versent davantage, que ces derniers ont confiance, à raison ou par ignorance (je penche pour l'ignorance). Mais que cela ne suffit même pas. On peut avoir une panique à l'occasion d'un crise imprévue un beau matin, ou tenir quelques années et arriver à l'inéluctable: la perte ou la nationalisation de votre épargne financière.

C'est la même chose pour les PEL/CEL, livrets A et autres, et même un simple compte bancaire: votre argent en banque ne vous appartient pas, vous avez juste une créance sur la banque, que la banque ne vous règlera pas en cas de faillite ou crise systémique, celà s'est déjà produit en Europe (à Chypre).

Alors avant de faire un nouveau versement sur votre assurance-vie, votre PEL ou tout autre support financier où vous dépendez d'une contrepartie (banque, assureur, l'Etat), réfléchissez.

D'autres solutions existent pour placer votre épargne avec un support tangible (immobilier, actions, bijoux, matières précieuses etc), en cas de crise elles seront perturbées mais ne disparaitront pas par décret gouvernemental.

cordialement

John

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commentaires

G
Merci John pour vos analyses toujours très intéressantes.Mais quel crédit doit on accorder à ce scénario apocalyptique?<br /> Peut on nuancer le degré de risque en regardant la composition des fonds euros qui ne sont pas entièrement en obligations d'état:ex Afer 34°/° et 54°/° obligations privées+divers?<br /> Que penser des fonds euros diversifiés ex Suravenir opportunités :44°/° obligations d'état et corporate+diversification ou Netissima avec une forte proportion d'immobilier?<br /> Bien cordialement .
J
Bonjour, vous avez tout à fait raison: certains fonds Euros sont avantageusement diversifiés sur des placements moins exposés au risque systémique. Mon propos attire l'attention sur le cas général de fonds Euros où l'assureur s'est placé en obligations souveraines sans se fatiguer. Il convient d'étudier les fonds Euros au cas par cas.
S
Bonjour,<br /> Merci egalement pour ce tres Bon article. Quels sont les risques associes a une assurance vie en unite de compte?<br /> <br /> Bien cordialement
J
Bonjour<br /> Les unités de compte sont aussi une créance sur l'assureur, donc à risque dans l'absolu; mais l'assureur ne doit leur rachat qu'au prix du marché des unités (les fonds), ce qui ne lui fait courir aucun risque; il ne devrait donc pas les amputer. <br /> Le risque principal porte sur les fonds Euros, car garantis en capital par l'assureur et constitués en grande partie d'obligations souveraines dépréciées, le seul moyen pour l'assureur de rester en vie est de réduire, puis supprimer le versement d'intérêt, et si çà ne suffit pas, de geler les rachats pendant un certain temps, puis de faire sauter la garantie en capital, et de les racheter à une fraction de leur montant; le tout sous la conduite de l'AMF.
J
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour cet article très intéressant qui résume bien le cercle vicieux qui est en place.<br /> <br /> Vous parlez d'achat d'action pour protéger son capital, est-ce qu'un PEA est un compte sûr pour éviter une future &quot;ponction&quot; gouvernementale? Vaut-il mieux ouvrir un compte titre?<br /> <br /> Merci encore pour votre site!
J
Le PEA est un compte-titre avec un régime fiscal avantageux, les deux sont ouverts chez une banque; donc en cas de crise bancaire, les deux sont à risque pareillement.<br /> En revanche les titres (actions, parts de fonds) sont enregistrés à votre nom donc pas susceptibles d'être confisqués, tandis que les liquidités sont des créances sur la banque donc exposé au risque de faillite.<br /> attention toutefois au choix des titres, car en cas de faillite bancaire, les bourses s'écrouleront.<br /> cordialement<br /> John

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